Voyager avec les idéologues : Constantin-François
Chasseboeuf de Volney
Genny Pugliese
¦
“Peu de voyageurs savent observer, moins encore savent
être fidèles”[i].
Tel est le regret de Roederer en 1793. C'est à cette exigence d’observation fidèle
qu'avaient répondu certains récits de voyage de la fin du XVIIIe siècle, conçus
dans une perspective scientifique, mais ils représentaient une minorité, selon
Roederer. Pourtant, leur écho dans la sphère intellectuelle est immense.
Constantin-François Chasseboeuf de Volney s'inscrit activement dans cette
reformulation de la pratique du voyage et de sa transcription littéraire.
N'étant plus soumis à des buts strictement professionnels, ni purement
pédagogiques, le voyage devient, au cours du siècle des Lumières, entreprise
culturelle. La pratique du Grand Tour, en tant qu'étape finale de l'éducation
de tout jeune homme bien né, a préparé la réhabilitation du voyage,
réhabilitation qui est le fruit d'une époque et de sa culture. Le voyage
devient en fait, grâce aux explorations de Jauffret, de Cook et surtout de
Bougainville, une enquête géographique et ethno-anthropologique[ii],
en raison aussi d'une nouvelle vision des sciences humaines. Volney applique concrètement dans ses voyages, et dans ses récits
de voyage, la théorie élaborée par le groupe des idéologues, dont il fait partie. Théorie qui introduit, dans la
culture de la fin du siècle, les fondements scientifiques favorables qui
entraînent la reformulation de la pratique du voyage. A travers les travaux des
idéologues, la géographie acquiert un
sens nouveau et devient science de la présence humaine sur la terre.
Tout en prenant en considération les données
ethnographiques, les écrits de voyage du XVIIIe ne s'arrêtent pas à
l’accumulation de ces mêmes données, mais ils inaugurent la réflexion
ethnologique. Une réflexion qui vient de la constatation des différences
sociales et culturelles des pays étrangers et qui, du coup, permet de porter un
regard différent sur son pays d’origine. Ainsi, la géographie se relie-t-elle à
cette science que les modernes appelleront ensuite ethnologie et qui est “science de l'homme considéré comme
appartenant à une espèce répandue sur le globe et divisée en divers corps de
sociétés, ou nations, occupées à pourvoir leurs besoins et à leurs goûts, et
plus ou moins civilisés.”[iii]
L'idéologie en route : Volney
Le Voyage en Egypte
et en Syrie développe tous ces éléments. C'est l'œuvre d'un voyageur-philosophe[iv],
Volney, capable de s'élever, grâce à sa préparation culturelle et scientifique,
au-dessus de la partialité de l'opinion commune et de profiter au maximum de
l'expérience du voyage. Volney représente, ainsi, un modèle pour tous les
voyageurs à venir. Là où le voyageur superficiel, d'après le brillant portrait
ironique qu'en fait La Rochefoucauld-Liancourt, manque d’ordinaire des
connaissances nécessaires et voit avec des préjugés, le voyageur-philosophe se sert de son bagage culturel pour bien cibler
ses questions.
L'attitude scientifique dans l'entreprise du
voyage est consacrée, aussi, par la publication des Instructions de voyage, les plus connues étant notamment celles de
Michaelis[v].
Dans cette œuvre, écrite à l'occasion du voyage en Arabie guidé par le danois
Corsten Niebuhr, l'orientaliste allemand souligne la nécessité de connaître la
langue du pays que l'on va visiter. De là naît toute une génération de
navigateurs modernes qui "n'ont pour objet, en décrivant les mœurs des
peuples nouveaux, que de compléter l'histoire de l'homme"[vi].
Et il en dérive une vogue littéraire à la valeur scientifique et littéraire
élevée:
Jamais il n'a paru tant de Voyages, et jamais ils n'ont été si
recherchés. Outre la variété des lectures également instructives et amusantes qu'ils
procurent à la classe ordinaire de lecteurs, c'est d'ailleurs une mine féconde
où, de tout temps, ont fouillé, pour faire ou appuyer leurs recherches, les
naturalistes et les géographes, les artistes et les archéologues; enfin les
écrivains politiques, les moralistes mêmes[vii].
Volney, fils de cette culture, a lu les Instructions de voyage de Michaelis, et
a adopté son discours. Dans ses Questions
de Statistique, il réaffirme la nécessité d'apprendre la langue du pays que
l'on va visiter et fixe le parcours à suivre au cours d'un voyage. A son avis
il faut d'abord analyser la situation géographique, l'état du ciel et du sol du
pays. Ensuite, passer à l'observation de la situation politique et sociale,
surtout à travers le dialogue avec les habitants du pays, “non seulement
avec les princi-paux, mais avec les plus chétifs.”[viii].
Un dialogue pour lequel il rédige une liste de questions possibles.
Constantin-François Chasseboeuf[ix] se
décide au voyage en Orient à l'âge de vingt-cinq ans, profitant d'une petite
rente que sa mère lui a laissée en mourant prématurément. Les études de droit
et de médecine ne l'ont pas du tout passionné. Il s'est intéressé, au
contraire, à la philologie et aux langues orientales et a suivi les cours
d'arabe de Leroux de Houtesrage au Collège de France. Avant d'entreprendre son
long voyage (qui durera trois ans) en Syrie et en Egypte, il s'enferme dans un
couvent de Coptes au Liban pendant huit mois, pour mieux y apprendre l'arabe. Prêt,
donc, au départ, il se rend en Orient en assez mince équipage, mais doué d'un
remarquable bagage culturel qui inclut les principes de l'évidence cartésienne
et de l'analyse sensualiste. Mais il a fréquenté aussi le salon du baron
d'Holbach, où il a été introduit par son ami Cabanis, connu à l'époque où il
suivait des cours de médecine.
Ses Voyages
se ressentent de sa formation éclectique: en médecin, il décrit de manière
détaillée les symptômes de la fièvre jaune dans son Tableau du climat et du sol des Etats-Unis d'Amérique; dans son Voyage de 1787 (en Egypte et en Syrie)
il se fait hydrologue lorsqu'il lui faut plus de trente pages pour décrire le
Nil.
Ce voyageur savant, au regard lucide et
désabusé, étudie l'arabe et approfondit la connaissance de l'anglais avant
d'entreprendre les deux voyages de 1782 et de 1795. Il est à la fois
innovateur, puisqu'il inaugure l'approche pluridisciplinaire des sciences
humaines, et fils de son époque. Il recueille, en fait, ce que le siècle des
Lumières et l'âge classique en général ont produit de meilleur. Il hérite des
caractéristiques des moralistes du XVIIe siècle, tel que l'art du portrait, comme le montre le passage suivant:
“C'était la première fois que je voyais à
loisir cette espèce d'hommes déjà devenue rare à l'est des Alleghanys: leur
aspect fut pour moi un specta-cle nouveau et bizarre. Imaginez des corps presque
nus, bronzés par le soleil et le grand air, reluisant de graisse et de fumée;
la tête nue, de gros cheveux noirs, lisses, droits et plats; le visage masqué
[…]; une narine percée pour porter un gros anneau de cuivre ou d'argent.”[x]
Il traite aussi un sujet cher aux moralistes,
c'est-à-dire l'habitude, et il la définit comme “atmosphère physique et
morale que l'on respire sans s'en apercevoir et dont l'on ne peut connaître les
qualités propres et distinctives qu'en respirant un air différent”[xi].
Volney est un moraliste chrétien qui
n'hésite pas à entreprendre un dialogue imaginaire avec le fantôme du Génie
dans Les Ruines, afin d’énoncer des
principes de vie et des considérations morales. Le dégoût du Génie face à la
guerre, c'est-à-dire face aux “cavaliers qui allument, et qui, le sabre à la
main, se répandent dans les campagnes” et devant qui “fuient des troupes
éperdues d'enfants, de femmes, de vieillards”[xii] est
le dégoût de l'écrivain lui même. On retrouve la même attitude quant aux
“prières sacrilèges” que des “mortels insensés”, c'est-à-dire les Ottomans
musulmans d'un côté, et les Russes orthodoxes chrétiens de l'autre, adressaient
à leurs dieux pour la guerre[xiii].
Son moralisme transparaît de nouveau dans l'appendice à son Voyage en Amérique, sous le nom d'Observations générales sur les Indiens ou
Sauvages, lorsqu'il condamne le vice de l'alcool[xiv]
et dans la description des effets de la famine en Egypte des trois années
précédant son arrivée en Orient[xv].
Mais Volney montre aussi sa formation de
“philosophe.” En commençant par l'étude du sol et du climat, il s’attache à
l'observation du travail et de la distribution des rôles dans la population.
Enfin, Volney se propose non seulement de voir, mais de regarder, et de noter,
les habitudes, les mœurs et les préjugés des peuples visités. Il est convaincu
aussi qu'il y a un rapport étroit entre le physique de l'homme et le milieu qui
l'entoure, quoiqu'il s'oppose à la théorie des climats et de leur influence sur
les peuples de Montesquieu et au déterminisme historique qui en dérive[xvi].
De plus, Volney croit dans l'idée du progrès. Le Génie s'exclame : “Pour
démontrer une prétendue perfection rétrograde, il faudrait démentir le
témoignage des faits et de la raison.”[xvii].
Le philosophe se heurte, de plus, à l'ignorance actuelle des Coptes et des
Egyptiens, dont il voit la cause dans la rareté des livres et qui contraste avec
la richesse culturelle de leur passé et les rend aveugles[xviii].
A côté de l'éducation, lumière et base du progrès de toute civilisation,
leitmotiv du XVIIIe siècle, on trouve aussi, chez Volney, la condamnation du
fanatisme religieux.
Notre voyageur savant se distingue, donc, comme voyageur-philosophe. Pour la foule des
voyageurs ces contrastes ne sont que bizarres ; mais pour des philosophes,
il pourrait être intéressant de rechercher d'où est venue cette diversité d'habitudes
dans des hommes qui ont les mêmes besoins, et dans les peuples qui pourraient
avoir une origine commune[xix].
Il se heurte à l’assurance superficielle et
la hardiesse de certains voyageurs du passé et du présent, tel que Pauw, qui
ont soutenu des faits faux, pour en tirer des conséquences chimériques et des
affirmations paradoxales. Constantin-François Chasseboeuf en arrive à choisir
les pays de ses voyages dans un but de nature philosophique et se rend en
Egypte et en Syrie parce que c'est dans ces régions que “sont nées la plupart
des opinions qui nous gouvernent et des idées religieuses qui ont influé si
puissamment sur la morale publique et particulière.”[xx]
de l'Occident. Mais le
philosophe Volney n'atteint pas, toutefois, l'objectivité totale, puisqu'il
observe l'Orient en européen. Dans
son Voyage on retrouve souvent
l'opposition lexicale “nous” (les Européens) contre “eux” (les Orientaux). Une
opposition qui dénonce des symptômes d'eurocentrisme:
“[…] chez nous, les voyages sont des
promenades agréables; là, ils sont des travaux pénibles et dangereux. Ils sont
tels surtout pour les Européens, qu'un peuple superstitieux s'opiniâtre à
regarder comme des sorciers, qui viennent enlever par magie des trésors gardés
sous les ruines par des génies.”[xxi]
“Dans notre Europe”, “par rapport à nous” sont des
expressions récurrentes dans le Voyage en
Egypte et en Syrie. Volney fait allusion aux autochtones à travers les
pronoms “ils/eux”, impliquant une opposition claire par rapport à lui et aux
voyageurs européens en général. Le passage suivant est particulièrement
significatif pour y repérer les deux champs lexicaux :
“Lorsqu'un Européen arrive en Syrie, et
même en général en Orient, ce qui le frappe le plus dans l'intérieur des
habitants est l'opposition presque totale de leurs manières aux nôtres […].
Nous portons des vêtements courts et serrés; ils les portent longs et amples.
Nous laissons croître les cheveux, et nous rasons la barbe; ils laissent
croître la barbe et rasent les cheveux. Chez nous, se découvrir la tête est une
marque de respect; chez eux, une tête nue est un signe de folie […] Nous
passons la vie debout, eux assis […] Enfin, jusque dans les choses du langage,
ils écrivent à contre sens, et la plupart de nos noms sont féminins chez
eux.”[xxii]
Il est vrai que ces remarques pourraient être
interprétées aussi comme de pures comparaisons, n'impliquant aucun jugement de
valeur. L'opposition serait neutre en ce cas et servirait de guide aux futurs
voyageurs français en Orient, pour qu'ils évitent des fautes banales ou ne
soient pas trop étonnés par certaines différences.
La neutralité de Volney dans son Voyage en Egypte et en Syrie peut être
illustrée par certains passages tirés de son Tableau du climat et du sol des Etats-Unis d'Amérique. Dans ce texte
le comte de Volney privilégie l'Orient, et non l'Europe, comme terme de
comparaison par rapport à l'Amérique. Ou bien il met au même niveau France,
Egypte et Syrie, toujours comme termes de comparaison avec l'Amérique :
“[…] je me bornerai à dire que,
comparativement aux pays que j'ai vus et sans renoncer aux préjugés de mes
sensations et de ma constitution natale, le climat de l'Egypte, de la Syrie, de
la France et de tout ce qui entoure la Méditerranée, me paraît très supérieur
en bonté, salubrité et agrément aux Etats-Unis.”[xxiii]
Et
encore :
“Pour un voyageur européen, et surtout un
voyageur habitué comme moi aux contrées de l'Egypte, de l'Asie et des bords de
la Méditerranée, le trait saillant du sol américain est un aspect sauvage de forêt
presque universelle […]”[xxiv]
comme il remarque aussi la ressemblance entre les
Tartares et les “sauva-ges” de l'Amérique du Nord[xxv]. La
récurrence du terme “sauvage” trahit cependant, chez Volney, l'adhésion à un
système conceptuel de type eurocentrique.
Volney,
voyageur “romantique”
On a parlé des intentions civiles qui détermineraient le
choix des pays à visiter du voyageur-philosophe.
Cependant, on ne peut pas nier la présence d'un certain goût de l'aventure chez
Volney. Le voyage en tant que topos d'un
parcours pédagogique qui va de Montaigne à Fénelon, en passant par Diderot,
n'est pas absent de l'esprit du philosophe voyageur. Mais ce dernier ressent,
en même temps, l'exigence “romantique”
d'aventures. D'après S. Moravia, Volney cherchait la nouveauté, son pays et les
états voisins lui paraissant trop connus ou faciles à connaître[xxvi].
Dans le récit que Volney fait de son voyage en Amérique, il évoque la déception
et de la tristesse qui l’envahissent avant de s'embarquer et leur oppose
l'enthousiasme avec lequel il entreprit son premier voyage :
“Lorsqu'en 1783, je partais de Marseille,
c'était de plein gré, avec cette alacrité, cette confiance en autrui et en soi,
qui inspire la jeunesse: je quittai gaiement un pays d'abondance et de paix,
pour aller vivre dans un pays de barbarie et de misère, sans autre motif que
d'employer le temps d'une jeunesse inquiète et active à me procurer des
connaissances d'un genre neuf, et à embellir par elles le reste de ma vie,
d'une auréole de considération et d'estime.”[xxvii]
On retrouvera ensuite les mêmes états d'âme chez
Tocqueville et chez tous les voyageurs romantiques, comme on les retrouve aussi
dans les écrits historiques de Volney, là où le voyage dans le temps se relie
au déplacement spatial. L'écrivain apparaît souvent dans Les Ruines “immobile, absorbé dans une mélancolie profonde”[xxviii]
dans une rêverie irréelle, et consolé, dans son malheur existentiel, par les
ruines.
La continuité de l'écriture
historique et de voyage, chez Volney, va au-delà de la ressemblance de style.
Les contenus mêmes se rapprochent, puisque la réflexion sur le passé naît de
l'expérience du voyage :
“Je
voyageais dans l'Empire des Ottomans […] qui jadis furent les royaumes d'Egypte
et de Syrie […] Chaque jour je trouvais sur ma route des champs abandonnés, des
villages déserts, des villes en ruines […] et ce spectacle tourna mon esprit vers la méditation des
temps passés.”[xxix]
En résumé, le voyage et la méditation historique trouvent
leur point de départ au carrefour d'idées de la fin du XVIIIe siècle, notamment
dans l’œuvre du représentant des idéologues
le plus connu qui affirme : “Les voyages en ce sens atteignent au but
de l'histoire, et ils y marchent avec plus d'avantage.”[xxx]
Les Ruines, à la suite du Voyage, mettent en relief l'ambiguïté apparente de l'écriture de Volney. D'un
côté l'idéologue s'inscrit dans la
tradition classique avec son style et son attitude de moraliste chrétien. De
l'autre c'est le penseur de transition qui prolonge le sensualisme condillacien
d'Helvétius et du baron d'Holbach. Et enfin, c'est l'innovateur qui inaugure
l'interdisciplinarité des sciences humaines et anticipe la mélancolie
romantique.
Toutefois, si l'on adopte l'interprétation
critique de René Pomeau, qui souligne la coexistence de la raison philosophique
et de la sensibilité “moderne” au sein de l'âge classique finissant, l’ambiguïté est apparente:
“On reconnaîtra que dans le XVIIe siècle
finissant la mode des voyages ne procède pas uniquement d'une curiosité
philosophique […] Simultanément l'imagination des lecteurs se délecte aux
contes de fées […] La vogue des voyages manifeste une sensibilité alors
'moderne', cherchant à s'évader du décor classique, vieilli et usé, allant
quérir ailleurs cette nouveauté
inouïe, qui constitue l'essence de la poésie.”[xxxi]
Toujours d'après cette interprétation, encore, le siècle
des Lumières ouvre la voie à la sensibilité moderne. Volney représenterait,
ainsi, le XVIIIe siècle dans tous ses aspects. Il incarne l'idée du voyage
telle que l'Encyclopédie l'a conçue, c'est-à-dire comme entreprise dont le but
principal est l'examen des mœurs, des coutumes, du goût dominant d'un peuple,
de son génie, de son art, du niveau des sciences, des manufactures et du
commerce et représente aussi l'ouverture à l'altérité. “L'européo-centrisme est
corrigé par une volonté d'ouverture vers les cultures non-européennes: de même
que la Perse, l'Inde, la Chine, l'Islam en bénéficient.”[xxxii]
Chez Volney tous ces
aspects coexistent avec les prémices d'une sensibilité moderne, et dans les
contenus, et dans la méthode pluridisciplinaire, mais exprimée dans un style
classique, reflet de la culture de l’idéologue.
Une culture tout européenne qui sait, toutefois, s’ouvrir aux cultures
“autres”.
Grâce aux travaux de Volney, l’idéologie, qui doit pourtant beaucoup à la philosophie des
Lumières, va au-delà de celle-ci. Malgré quelques traces d’eurocentrisme,
l’esprit de découverte scientifique des idéologues
sait mieux assimiler le discours de l’altérité par rapport au cosmopolitisme
philosophique, coincé par la démonstration de thèses préétablies. Une
ouverture, celle des idéologues, qui
se révèle dans son actualité profonde et qui ne manque pas de susciter maintes
réflexions, surtout de nos jours.
Genny Pugliese
Université de Bari
[i] P. L. Roederer, Cours
d'organisation sociale [in] Œuvres
complètes, Paris, 1853-59, vol. VIII, p. 165.
[ii] Voir S. Moravia, Il
pensiero degli idéologues. Scienza e filosofia in Francia (1780-1815),
Firenze, La Nuova Italia, 1974, p. 557.
[iii] Définition d'Al. C. Chavennes [in] S.
Moravia, La scienza dell'uomo nel
Settecento, Bari, Laterza, 1970, p. 153.
[iv] J’ai repris la définition de voyageur-philosophe donnée par Numa Broc
dans sa thèse de doctorat ès lettres présentée devant l’Université Paul Valéry
de Montpellier : La Géographie des
Philosophes. Géographes et Voyageurs français au XVIIIe siècle, Lille,
Service de reproduction des thèses de l’Université, 1972. Cette définition ne
renvoie pas à l’idée de philosophe en
tant qu’homme de lettres imprégné des théories des Lumières. Fidèle à l’esprit
de l’âge classique, elle désigne, plutôt, l’homme de lettres tout court, l’aimant de la “sophie”. Or,
en raison de son amour pour le savoir, le philosophe
se révèle, à l’occasion d’un voyage, enquêteur infatigable. Aux antipodes de la
superficialité du voyageur commun, le voyageur-philosophe
fait “preuve d ‘esprit “philosophique”, c’est-à-dire de l’aptitude à la
critique, à la comparaison, à la généralisation.” Ibid, p. 262.
[v] Le texte fut traduit en français en 1768 sous le titre Les voyageurs savans ou curieux : ou,
Tablettes instructives et guide de ceux que Sa Majesté Danoise a envoyé en
Arabie, et aux Pays voisins de la Palestine, de la Perse et le Mogol ou l'Inde,
et vers la Mer-Rouge et l'Egypte, Pour l'éclaircissement de questions très
importantes de l'Histoire, de la Nature et des Arts, Rédigé et Publié par Mr.
MICHAELIS, traduit de l'allemand et accompagné de Figures, en deux volumes.
[vi] Jean-François de La Pérouse, Voyage
autour du monde […], Paris, 1798, vol. II, p. 141.
[vii] G. Boucher de La Richarderie, Bibliothèque universelle des Voyages ou
Notice complète et raisonnée de tous les voyages anciens et modernes dans les
différentes parties du monde, publiés tant en langue française qu'en langues
étrangères, classés par ordre de pays dans leur série chronologique, Paris,
1808, vol. I, p. V.
[viii] Extrait d'une conversation entre Volney et
un de ses biographes, Besnard, citée [in] S. Moravia, Il pensiero degli idéologues. Scienza e filosofia in
Francia (1780-1815), op. cit., p.
594.
[ix] C'est son vrai nom, Volney ne serait que
son nom de plume, venant soit de la fusion de la première syllabe du nom 'Voltaire'
avec la dernière syllabe du nom de sa résidence, 'Ferney', soit de la
traduction en arabe de son nom de famille.
[x] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Observations générales sur les Indiens ou Sauvages, appendice au Tableau du climat et du sol des Etats-Unis
d’Amérique [in] Œuvres de C.-F.
Volney, Paris, Parmantier, 1826, 8 t., p. 372. Deuxième édition complète.
[xi] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Tableau du climat et du sol des Etats-Unis d'Amérique, op. cit., p. 315.
[xii] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Les Ruines, Paris, Desenne, 1792,
p.75-76.
[xiii] Ibid, p. 80.
[xiv] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Tableau du climat et du sol des Etats-Unis d’Amérique, op. cit., p. 373.
[xv] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Voyage en Egypte et en Syrie, “Etat politique de l'Egypte”, section
[in]Oeuvres de C.-F. Volney, op. cit., p. 154.
[xvi] Ibid, p.155.
[xvii] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Les Ruines, op. cit., p.
101.
[xviii] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Voyage en Egypte et en Syrie, section
“Etat politique de l'Egypte”, op. cit.
p. 162.
[xix] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Voyage en Egypte et en Syrie, section
“Etat politique de la Syrie”, op. cit.,
p. 285-286.
[xx] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Préface au Voyage en Egypte
et en Syrie [in]Œuvres,
Bruxelles, Wehlen, 1823, 2 t., p. III-IV.
[xxi] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Voyage en Egypte et en Syrie, section “Etat physique de L'Egypte”, op. cit., p. 10.
[xxii] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Voyage en Egypte et en Syrie, section “Etat politique de la Syrie”,
op. cit., p. 285.
[xxiii] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Tableau du climat et du sol des Etats-Unis d'Amérique, op. cit., p. 316.
[xxiv] Ibid, p.6.
[xxv] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Observations générales sur les Indiens ou Sauvages, appendice au Tableau du climat et du sol des Etats-Unis
d'Amérique, op. cit., p.385.
[xxvi] S. Moravia, Il pensiero
degli idéologues. Scienza e filosofia in Francia (1780-1815), op. cit., p. 591.
[xxvii] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Préface au Tableau du climat
et du sol des Etats-Unis d'Amérique, op.
cit., p. I-II.
[xxviii] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Les Ruines, op. cit., p.
11-12.
[xxix] Ibid, p. 1-2.
[xxx] Constantin-François Chasseboeuf de Volney, Voyage en Egypte et en Syrie, section “Etat politique de la Syrie”,
op. cit., p. 317.
[xxxi] René Pomeau, “Voyage et lumières dans la littérature française
du XVIIIe siècle” [in] Studies on
Voltaire, 1967, 57, p. 1271-1272.